dimanche 28 février 2010

Effroi

Je lis ceci dans le livre de Fabrice Midal : "Et si de l'amour , on ne savait rien?"

"Contrairement à tous les discours convenus, l'amour, loin d'être désirable, le plus souvent terrifie.
Et comme la plupart des hommes parlent d'amour sans reconnaître que celui-ci les effraie, leurs discours sont creux et égarants .
L'amour n'est pas évoqué avec vérité par le lyrisme sirupeux auquel on l'associe, mais il l'est chaque fois qu'on parle de l'effroi que sa présence occasionne."


Ce texte fait aussi écho au texte de Lilou qui s'appelle "mot" et que l'on trouve ICI

D'où vient ce si terrible effroi ?
A mon humble avis, l'amour ouvre une brèche vers un insaisissable, un non-maîtrisable qui est de l'ordre de l'universel et du sacré. Il est un point de vulnérabilité à la toute puissance de l'égo, comme une plaie ouverte dans la carapace de l'homme devenu dieu.

La plupart du temps, nous préférons discourir sans fin , nous livrer à la pornographie , à la guerre, ou tout simplement écrire à propos de l'amour plutôt que de nous laisser blesser par une si terrible fragilité. Nous n'ignorons pas l'amour mais nous le contournons de milles façons.

Emmanuel Lévinas a écrit à propos du visage dans sa nudité qu'il s'imposait à moi sans que je puisse rester sourd à la fragilité constitutive de son humanité.
C'est sans doute pour cela que la blogosphère et les réseaux sociaux virtuels ont tellement de succès, ils nous permettent de contourner impunément ce qui constitue l'essence même de notre humanité, cette effrayante vulnérabilité...


8 commentaires:

Jean-Marc a dit…

Il souffle un vent terrible.
Ce n’est qu’un petit trou dans ma poitrine,
Mais il y souffle un vent terrible. [...]
Dans le trou il y a haine (toujours), effroi aussi et impuissance,
Il y a impuissance et le vent en est dense,
Fort comme sont les tourbillons.

Michaux, Ecuador

catherine a dit…

@Jean-Marc
Ah Michaux! Quel homme intéressant..
Il a passé son enfance à la rue Defacqz à Bruxelles et j'ai moi-même habité pendant 3 ans à côté de cette rue. Il a exploré la poésie, la prose et ensuite la peinture et les arts graphiques et s'est adonné toute sa vie à la tenue d'un journal et à l'analyse de son intériorité.
Pas étonnant qu'il ait lui aussi, découvert ce trou où peut souffler un vent violent et effrayant.
De nombreux poètes sont assez proches des philosophes et ils vont même parfois plus loin car ils trouvent dans les techniques poétiques comme la métaphore ou l'allégorie ce que la philosophie est impuissante à exprimer.

Jean-Marc a dit…

Accepter d'aimer c'est accepter d'être vulnérable.

catherine a dit…

@Jean-Marc

Oui et c'est bien à cause de cette vulnérabilité aussi que parfois les humains préfèrent éviter d'aimer.

Arthémisia a dit…

"Le visage est ce qui interdit de tuer" -Emmanuel LEVINAS

Est ce pour antant ce qui fait vie?

catherine a dit…

@Arthémisia

Ton commentaire m'interpelle surtout par rapport à ce que j'ai écrit dans mon texte au sujet de la "virtualité";
oui, je crois que le visage fait vie.
En tout cas pour moi, le visage fait vie.
Je t'ai déjà parlé de mon malaise par rapport aux relations qui demeurent dans une virtualité pure sans jamais s'ancrer dans aucune réalité. Il y a pour moi une perte d'humanité douloureuse voire mortifère .
J'ai été heureuse de mettre un jour un visage sur ton nom.
Je t'embrasse Arthi

O; a dit…

Catherine, tu as rison, l'amour est notre fragilité, mais nous ne saurions le fuite, sans casser notre vie comme une branche sèche.
Il faudrait savoir aimer avec précaution... mais ça n'existe pas.
Bises

catherine a dit…

@O
Les femmes peut-être ont un peu plus de mal mais je suis de plus en plus persuadée que beaucoup de gens ont la capacité de demeurer armé et fermé à cette fragilité.
Bien sûr qu'il y a des branches sèches...
Bises